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La protection de la personne des majeurs

février 2006, par Jean-Louis DESCHAMPS

Travail réalisé à la suite de la conférence de l’ANREP "La tutelle à la personne", le 20 octobre 2005 au CMP d’Orange en présence de Mme N. Lefebvre-Ibañez, juge des tutelles.

Date de l’étude : 30 novembre 2005

Si l’on procède à une lecture littérale du code civil, les régimes de protection des majeurs se présentent principalement comme des régimes de protection des patrimoines. Thierry Fossier et Michèle Harichaux écrivaient fort justement dans la Revue de droit sanitaire et social de janvier-mars 1991 que "la loi de 1968... est à peu près muette" sur la protection de la personne du majeur. Constatant "les silences" de la loi sur la protection de la personne des majeurs, ces auteurs considéraient que la matière était régie sur la base d’un "simple principe jurisprudentiel" et ils résumaient parfaitement l’opinion des auteurs de la doctrine juridique lorsqu’ils affirmaient : "On a dit que la loi de 1968 avait manqué d’ambition". Cette opinion est encore partagée par un certain nombre d’auteurs de la doctrine.
D’autres auteurs estiment que la matière n’est pas régie par un simple principe jurisprudentiel mais que le poids sociologique de la conception antérieure a masqué les potentialités de la nouvelle législation. Avant toute réflexion sur la protection de la personne des majeurs, il faut :
- se rappeler qu’avant 1968 les mesures de protection avaient pour finalité la protection du patrimoine familial, beaucoup plus que la défense des intérêts civils, et que la notion de protection de la personne protégée était quasiment inexistante ;
- avoir présent à l’esprit le fait que la loi de 1968, pas davantage que toute autre loi, ne définit la personne humaine ;
- que la philosophie traditionnelle du droit français a longtemps été une philosophie voltairienne qui excluait du champ des droits de l’homme l’individu dénué de raison.
Si la protection de la personne n’a jamais totalement été exclue du dispositif législatif et réglementaire, elle fut longtemps perçue comme relevant d’autres champs de législation que celui de la protection des majeurs. C’est d’ailleurs non pas dans ce champ juridique, mais dans celui de l’hospitalisation sous la contrainte, que se situe toujours le seul organe de protection de la personne institué expressément par le droit positif. Il s’agit du "curateur à la personne",évoqué par l’article L.3 211-9 du code de la santé publique. Ce dispositif ne concerne que la protection de la personne hospitalisée sans consentement dans un établissement psychiatrique. La protection du majeur, mise en place par l’article L.3 211-9 du code de la santé publique, n’est entendue que sous l’angle restrictif de la seule protection de la liberté. C’est à juste raison que les rapports ministériels établis dans la perspective de la réforme de la loi de 1968 conçoivent la protection de la personne du majeur dans sa globalité, et envisagent la mise en place d’un système global et cohérent. La protection de la personne des majeurs est assurée dans le code de la santé publique par d’autres dispositions que l’article L.3 211-9, il en est ainsi par exemple des dispositions qui ont été introduites dans ce code par la loi Huriet-Serusclat de 1988 pour ce qui concerne le consentement à la recherche biomédicale, ou encore de celles qui ont été introduites par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 pour ce qui concerne l’information des usagers du système de santé et l’expression de leur volonté.

LA PROTECTION DE LA PERSONNE DES MAJEURS DANS LE CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE

*L’article L.3 211-9 du code de la santé publique : le "curateur à la personne"

À l’époque où fut mise en chantier la loi de 1968, la loi du 30 juin 1838 était toujours en vigueur. Cette dernière loi avait institué un "curateur à la personne" qui pouvait être désigné par le tribunal civil pour protéger la personne des patients internés. Le concept juridique de "curateur à la personne" a été maintenu par la loi n° 90-527 du 27 juin 1990. Le concept est formulé par le premier alinéa de l’article L.3 211-9 du code de la santé publique qui développe que "sur demande de l’intéressé, de son conjoint, de l’un de ses parents ou de toute personne agissant dans l’intérêt du malade, ou à l’initiative du procureur de la République du lieu du traitement, le tribunal pourra nommer en chambre du conseil, par jugement exécutoire malgré appel, un curateur à la personne du malade n’ayant pas fait l’objet d’une mesure de protection et hospitalisé sans son consentement dans un des établissements mentionnés à l’article L.3 222-1”. Le dernier alinéa de l’article L.3 211-9 énonce une incompatibilité à l’exercice de la fonction. Il précise que "hormis le conjoint, ce curateur ne peut pas être choisi parmi les héritiers présomptifs de la personne hospitalisée". Cette incompatibilité est justifiée par un souci de prévention des conflits d’intérêt.
Les alinéas centraux concernent la mission du "curateur à la personne" : "Ce curateur veille :
1. À ce que les revenus disponibles du malade soient employés à adoucir son sort, à accélérer sa guérison et à favoriser sa réinsertion ;
2. À ce que ce malade soit rendu au libre exercice de ses droits dès que son état le permettra."
La lecture du dispositif sur la mission du "curateur à la personne" démontre que le législateur de 1990 a maintenu à ce curateur la mission de protection de la liberté du patient qui lui avait donné par son prédécesseur de 1838. Le législateur de 1990 a maintenu le concept sans chercher à l’améliorer en définissant avec exactitude les contours de la mission de "veille" qui demeure la sienne. Les deux directions vers lesquelles s’exerce cette "veille" demeurent énoncées par des formulations imprécises. Ces formulations ne permettent pas de déterminer quelles sont les situations concrètes où le patient a besoin de l’assistance du "curateur à la personne". Cette imprécision est étonnante car les auteurs de la doctrine juridique n’ont jamais manqué d’imagination pour énoncer des situations où il pourrait être fait appel au "curateur à la personne". Ces situations se présentent comme des scénarios possibles qui ne pourraient être concrétisés qu’à la suite d’une profonde réforme du schéma législatif qui perdure depuis 1838. Les scénarios actuels visent en particulier les situations pour lesquelles il n’existe pas de tiers susceptible de présenter une demande de tiers, ou encore, toujours dans les cas d’absence de tiers, les transformations d’hospitalisation d’office en hospitalisation à la demande d’un tiers. Dans cette perspective, Assia Boumaza et Thierry Fossier préconisent la désignation "de droit" d’un curateur à la personne, "dès que le malade en hospitalisation d’office est isolé pour éviter tout blocage lors de l’ouverture d’une procédure d’hospitalisation forcée et faciliter sa prise en charge thérapeutique ainsi que sa réinsertion par l’étape transitoire de l’hospitalisation sur demande d’un tiers. Son intervention pourrait également être préconisée pour les sorties d’essai afin de réunir les meilleures conditions de réinsertion sociale" (Gazette du Palais, dimanche 16 au mardi 18 janvier 2005, p. 7). Dans l’esprit de ces auteurs, le curateur à la personne participerait ainsi à la prise en charge post-hospitalière et participerait ainsi au travail de prévention des rechutes. Ces auteurs développent dans un paragraphe spécifique, intitulé "L’accompagnement à la réinsertion sociale", la problématique : "Après l’hospitalisation, le curateur aurait un rôle plus ’social’ à travers un accompagnement à la réinsertion. Il deviendrait un intervenant de proximité qui aurait la charge du malade à sa sortie pour la gestion quotidienne de sa vie. L’essentiel de sa mission consisterait à l’aider dans ses démarches en vue de se loger, d’obtenir un emploi adapté à son handicap, l’informer de ses droits en tant que citoyen et cesserait à l’acquisition de son autonomie. Plus concrètement, le curateur à la personne devrait adapter son rôle ’d’assistant’ selon l’état du malade avec une gradation dans les fonctions selon le degré de discernement". (Gazette du Palais, dimanche 16 au mardi 18 janvier 2005, p. 9).
Le très vif intérêt que portent les auteurs de la doctrine juridique au dispositif sur le "curateur à la personne" est étonnant, si l’on considère que le recours à cet organe fut inexistant, durant tout le temps de l’application de la loi du 30 juin 1838, et qu’il en est de même dans le système présent de la loi n° 90-527 du 27 juin 1990. L’absence de recours au "curateur à la personne" découle du fait que le dispositif de l’article L.3 211-9, en raison de ses incomplétudes, n’a jamais permis de répondre aux attentes fortes, exprimées depuis longtemps par les auteurs de la doctrine juridique. Le dispositif présente des incomplétudes majeures, que le législateur n’a curieusement jamais cherché à corriger.Ces incomplétudes interdisent toute application effective d’un dispositif, dont on hésite, parce qu’il est lourd de virtualité à dire qu’il fait vraiment parti du droit positif.
S’agissant des incomplétudes, il faut observer par exemple que les limites temporelles de la mission du "curateur à la personne" ne sont pas définies, et que du fait de cette absence de précision, il n’est pas possible d’affirmer que la mission du "curateur à la personne" s’étend à la période postérieure à l’hospitalisation. De la même manière les limites de la gestion patrimoniale du curateur à la personne, comme celles de sa gestion extra-patrimoniale, ne sont pas précisées par l’article L.3 211-9. Assia Boumaza et Thierry Fossier ont raison lorsqu’ils écrivent, considérant le caractère virtuel de l’institution que "le curateur à la personne malade est une institution qui pourrait largement trouver une existence en droit positif dès lors que les modalités d’application seraient précisées" (Gazette du Palais, dimanche 16 au mardi 18 janvier 2005, p.10).
Il existe également une autre interrogation qui explique l’absence de recours à ce dispositif. Elle porte sur la compétence du "tribunal", chargé de désigner le "curateur à la personne". Le terme imprécis de "tribunal", repris de l’article 38 de la loi du 30 juin 1838, désigne de manière certaine un juge civil, mais il ne précise pas s’il s’agit du juge de la détention et de la liberté qui est compétent pour examiner les recours évoqués par l’article L.3 211-12 du code de la santé publique, et qui à la compétence de droit commun sur la problématique juridictionnelle de protection de la liberté du patient hospitalisé sous contrainte, ou le juge des tutelles qui intervient traditionnellement en matière de tutelle et de curatelle des majeurs, et en matière de tutelle aux prestations sociales. Assia Boumaza et Thierry Fossier pensent qu’implicitement "le législateur a entendu donner compétence au juge des tutelles" (Gazette du Palais, dimanche 16 au mardi 18 janvier 2005, p.7). Assia Boumaza et Thierry Fossier insistent enfin sur le fait que la protection de la personne, instituée par le législateur de 1990, n’est autorisée par le premier alinéa de l’article L.3 211-9 du code de la santé publique que pour "la personne du malade n’ayant pas fait l’objet d’une mesure de protection". Ces auteurs considèrent avec pertinence que : "Il convient de relever, que vraisemblablement, dans l’esprit des rédacteurs le régime de protection des biens s’étendait nécessairement à la personne de l’incapable majeur" (Gazette du Palais, dimanche 16 au mardi 18 janvier 2005, p. 7). Si cette analyse est exacte cela signifie que le législateur de 1990 a donné implicitement une consistance législative à la jurisprudence antérieure qui a fait émerger le concept juridique de "tutelle à la personne".
À supposer que l’article L.3 211-9 ait pu connaître des applications pratiques, la protection de la personne n’aurait de toute manière jamais pu être étendue au-delà de la seule catégorie des malades "n’ayant pas fait l’objet d’une mesure de protection et hospitalisés sans leur consentement", alors que la problématique de la "protection de la personne des majeurs" concerne aussi des personnes qui comportent un risque d’hospitalisation sans consentement, mais qui sont hospitalisées avec leur consentement, ou qui ne sont point hospitalisées.
Assia Boumaza et Thierry Fossier posent à leur manière la problématique juridique : "Le curateur à la personne devrait être de plein droit admis pour tout malade ne disposant pas de l’intégralité de ses facultés, indépendamment de toute hospitalisation et de toute fortune personnelle" (Gazette du Palais, dimanche 16 au mardi 18 janvier 2005, p. 7). Ces auteurs développent qu’ils ne sont pas les seuls à défendre ce point de vue et que "certaines propositions privilégient la désignation systématique d’un curateur dès que le malade ne bénéficie d’aucun régime de protection prévu par la loi du S janvier 1968 (en particulier la tutelle ou la curatelle)". Ils ajoutent que "d’autres (propositions) préconisent, au-delà et indépendamment de la question des biens, la définition d’une catégorie de malades souffrant de pathologies altérant sérieusement le discernement. Dans ce cas, on pourrait envisager la liste non exhaustive de pathologies mentales susceptibles de justifier automatiquement la mise en place d’un curateur à la personne et pour les autres catégories la désignation d’un curateur pourrait intervenir sur justification".

Les autres dispositions contenues dans le code de la santé publique

La loi Huriet-Serusclat de 1988 a légiféré dans un domaine particulier de protection de la personne qui n’est pas celui des majeurs protégés, mais celui de la protection de la personne des malades mentaux hospitalisés sous la contrainte. Ce dispositif a précisé que les patients dont il s’agit étaient exclus, même avec leur consentement, de toute recherche biomédicale dont ils ne pourraient tirer un bénéfice direct et majeur pour leur santé. Ce dispositif qui est formulé dans l’article L.1 121-5 du code de la santé publique porte très fort le souci de protection de la personne des malades mentaux hospitalisés sous la contrainte. Il faut savoir que ce texte n’est pas passé en droit positif sans difficultés. Certains auteurs considéraient que ce dispositif serait de nature à appauvrir les possibilités de la recherche fondamentale en psychiatrie. Le débat qui eu lieu à cette époque a eu le mérite de faire prendre conscience des insuffisances de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 face aux évolutions de la médecine en cette fin du XXe siècle.
Il faut observer que le législateur protège la personne, qu’il s’agisse de malades mentaux hospitalisés sous la contrainte (comme dans le cas de la loi Huriet-Serusclat de 1988), ou d’incapables majeurs (comme c’est le cas dans les lois de bioéthique du 29 juillet 1994), au moyen d’interdits législatifs. La jurisprudence s’attache, dans d’autres domaines de santé publique où les textes législatifs ne sont pas précis, à protéger la personne dans un esprit plus permissif en envisageant comme possible l’accomplissement d’actes non interdits par le législateur, mais à la condition que l’acte dont il s’agit se déroule sous le contrôle du juge des tutelles.
Deux interdits législatifs ont été posés par les lois de bioéthique du 29 juillet 1994. Ils sont formulés pour le premier dans l’article L.1 321-2 du code de la santé publique et pour le second dans l’article L.1 241-2 du code de la santé publique. Les deux interdits qui touchent les incapables majeurs sont :
- les prélèvements en vue d’un don, sur une personne vivante majeure protégée par la loi (tutelle ou curatelle). Il s’agit d’un interdit absolu pour lequel aucune dérogation n’est possible ;
- les prélèvements de tissus et collectes de produits du corps humain sur une personne protégée par la loi (tutelle ou curatelle). Il s’agit d’un interdit absolu pour lequel aucune dérogation n’est possible. Cet interdit concerne également les prélèvements de sang ou de ses composants en vue de l’utilisation thérapeutique sur autrui.
La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 a mis en place dans le code de la santé publique une nouvelle sphère législative et réglementaire de protection de la personne des majeurs. Ainsi, le droit d’accès aux informations concernant la santé de l’incapable majeur, évoqué par l’article 1er du décret n° 2002-637 relatif aux informations personnelles détenues par les professionnels de santé, pris en application des articles L.1 111-7 et L.1 111-9 du code de la santé publique, doit être situé dans la sphère juridique de la protection de la personne du majeur.
La même observation peut être faite à propos de l’article L.1 111-2 de ce même code. Après avoir précisé dans son premier alinéa que "toute personne a le droit d’être informé sur son état de santé...", ce dispositif indique dans son cinquième alinéa que "les droits des majeurs exercés au présent article sont exercés... par le tuteur". L’alinéa ajoute que ce dernier reçoit "l’information prévue par le présent article... Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée à leurs facultés de discernement".

LA PROTECTION DE LA PERSONNE DES MAJEURS DANS LE CODE CIVIL

La sphère juridique de la protection du cadre de vie et du patrimoine affectif

Il existe dans le code civil un domaine qui paraît être une sphère juridique intermédiaire entre la protection des biens et la protection de la personne du majeur. Il concerne la protection du cadre de vie du majeur, et de ce que certains auteurs appellent "le patrimoine affectif". Cette protection est organisée par l’article 490-2 du code civil, qui précise :
"Quel que soit le régime de protection applicable, le logement de la personne protégée et les meubles meublants dont il est garni doivent être conservés à sa disposition aussi longtemps qu’il est possible.
Le pouvoir d’administrer, en ce qui touche ces biens, ne permet que des conventions de jouissance précaire, lesquelles devront cesser, malgré toutes dispositions ou stipulations contraires dès le retour de la personne protégée.
S’il devient nécessaire ou s’il est dans l’intérêt de la personne protégée qu’il soit disposé des droits relatifs à l’habitation ou que le mobilier soit aliéné, l’acte devra être autorisé par le juge des tutelles, après avis du médecin traitant, sans préjudice des autres formalités que peut requérir la nature des biens. Les souvenirs et autres objets de caractère personnel seront toujours exceptés de l’aliénation et devront être gardés à la disposition de la personne protégée, le cas échéant, par les soins de l’établissement de traitement
".
Si l’article 490-2, qui a un objectif très ciblé, s’approche du concept de "protection de la personne du majeur", il ne permet d’affirmer qu’il existe dans le code civil un principe général de protection de la personne.
Thierry Fossier considère que dans le cadre de la réforme du droit des incapables majeurs "la protection du logement et des souvenirs personnels sera bien évidemment reconduite, mais il faudra l’étendre aux objets indispensables aux handicapés ou destinés aux soins. Surtout le texte nouveau devra permettre au juge de trancher sur la résidence et les relations du majeur, lorsque ce dernier ne peut prendre seul la décision ou si un conflit surgit à ce propos : la jurisprudence s’est déjà prononcée en ce sens. L’aspect franchement contentieux de cette attribution du juge des tutelles nécessitera sans doute quelques précisions dans le nouveau code de procédure civile" (Defrénois 01/05, p.18).

L’introuvable notion de protection de la personne du majeur dans le code civil

La "tutelle à la personne des majeurs" est un concept juridique qui ne figure pas expressément dans le code civil. La notion de "protection de la personne", comme celle de "tutelle à la personne", figure certes dans ce code, mais elles se trouvent incluses dans des articles de ce code qui concernent la tutelle des mineurs. L’article 450 du code civil précise que "le tuteur prendra soins de la personne du mineur", tandis que l’article 417 du code civil évoque quant à lui une tutelle à "la personne" du mineur qui peut être distincte de la tutelle au bien. La formulation est ainsi rédigée : "Le conseil de famille peut... décider que la tutelle sera divisée entre un tuteur à la personne et un tuteur aux biens". Il faut observer que la notion évoquée dans ce dispositif est celle de "tutelle à la personne" et non de "tutelle de la personne". Pour certains auteurs les deux termes sont équivalents, alors que d’autres auteurs considèrent que la "tutelle à la personne" est un concept plus ouvert à une pédagogie d’éveil à la liberté et à l’autodétermination du sujet.
Comme les articles du code civil relatifs à la tutelle des majeurs, ne peuvent que permettre de discerner une ouverture sur la tutelle à la personne du majeur, certains auteurs de la doctrine considèrent la "tutelle à la personne des majeurs"trouve sa base légale dans le dispositif de l’article 495 du code civil qui énonce que "sont aussi applicables dans la tutelle des majeurs les règles prescrites par les sections 2,3, et 4 du chapitre II au titre dixième du présent livre, pour la tutelle des mineurs, à l’exception toutefois de celles qui concernent l’éducation de l’enfant et, en outre, sous les modifications qui suivent". Il faut observer toutefois que les décisions de justice rendues en matière de protection de la personne des majeurs ne font jamais référence à l’article 495 du code civil, et évoquent d’autres articles.
Ainsi, le tribunal de grande instance de Marseille, dans une décision rendue en le 25 janvier 1980 (TGI Marseille, 25/01/80, Dalloz, 1981, p. 266), a décelé une ouverture sur la tutelle à la personne du majeur dans le dispositif de l’article 500 du code civil qui concerne la gérance de tutelle. Cet article définit en son premier alinéa les pouvoirs du gérant de tutelle et donne à ce dernier des pouvoirs en matière d’entretien et de traitement du majeur. L’ouverture à la tutelle à la personne par le biais de l’article 490-2 du code civil n’était pas évidente, dans la mesure où l’article 499 du code civil, qui précède l’article 500 et qui constitue son fondement, ne fait aucunement référence à la notion de "personne", mais seulement à celle de "biens". L’article 499 a en effet une formulation qui ignore totalement la personne :"Si eu égard à la consistance des biens à gérer, constate l’inutilité d’une tutelle complète, il (le juge) peut se borner à désigner comme gérant de tutelle... soit un préposé appartenant au personnel administratif de l’établissement, soit un administrateur spécial..." L’ouverture de l’article 500 du code civil à la protection de la personne est encore contestée par certains contradicteurs qui continuent à opposer l’article R.1 112-37 du CSP qui développe que "les biens des incapables majeurs hospitalisés dans l’établissement sont administrés dans les conditions prévues par les articles 491-4,499 et 500 du code civil et par les décrets 169-95 pris pour l’application de l’article 499 du code civil et 169-96 fixant les modalités de gestion des biens de certains incapables majeurs dans les établissements de soins, d’hospitalisation et de cure publics". Interprété, comme conférant des pouvoirs en matière de protection de la personne, l’article 500 du code civil n’exclut pas d’autres actes tutélaires se situant toujours dans le champ de la protection de la personne, mais bien au-delà de la protection des besoins physiologiques de l’incapable que semblent recouvrir les notions d’entretien et de traitement.
Les juges des tutelles craignirent que la décision d’espèce du tribunal de grande instance de Marseille ne soit suivie d’autres jugements du même genre qui n’auraient pas manqué de les conduire à une multiplication du nombre d’ordonnances aboutissant à une saturation de leurs cabinets. Cette crainte était justifiée dans la mesure où l’article 500 du code civil est ainsi formulé : "Si d’autres actes deviennent nécessaires, il (le gérant de tutelle) saisit le juge qui pourra soit l’autoriser à les faire soit décider de constituer la tutelle complète".
L’article 500 du code civil posait en lui-même pour son application de nombreuses questions non résolues. Carol Jonas les a résumées dans le n° 37/94 de La Lettre de la psychiatrie française :
- "Où fixer la limite entre une nécessité de prononcer une tutelle complète et la possibilité d’autoriser ponctuellement le gérant à certains actes ?"
- "Quelles sont les conditions que le magistrat pourra imposer au gérant ?"
- "Peut-il autoriser le gérant à décider pour une série d’actes ?"
- "Doit-il être contacté chaque fois qu’un acte spécifique est nécessaire ?
"
La plupart des juges des tutelles estimèrent fort justement que l’article 500 du code civil posait beaucoup plus de problèmes qu’il n’en résolvait et qu’en l’absence de dispositions législatives claires intégrant un principe général de protection de la personne des majeurs, il convenait de se référer à l’arrêté n° 74-930 du 6 novembre 1974 qui était le seul texte de droit positif mentionnant expressément la notion de protection de la personne des majeurs mais dans le cadre des seules mesures de tutelle d’État. Ce dispositif était interprété par les juges des tutelles comme faisant obstacle à la prise en charge de la tutelle à la personne dans le cas des mesures autres que la tutelle d’État. La tutelle d’État est devenue dans ces conditions le régime qui était choisi par les juges des tutelles chaque fois qu’un majeur non susceptible d’être placé sous le régime de la tutelle complète présentait des difficultés personnelles.
Cette pratique a pris fin assez rapidement car elle constituait une dérive manifeste sur laquelle l’attention de la chancellerie avait été alertée par des parlementaires. Le garde des Sceaux a ainsi considéré, en réponse à une question écrite posée par un député à l’Assemblée nationale, monsieur J.-M. Bockel, que les juges des tutelles pouvaient autoriser sur le fondement de l’article 500 alinéa 2 du code civil les gérants de tutelle à réaliser toutes sortes d’actes personnels (J.O. déb. Ass. Nat. 6 décembre 1982, p. 5057). Les juges des tutelles ont dès lors timidement usé de l’article 500 alinéa 2 du code civil lorsqu’il apparaissait que l’acte envisagé présentait un caractère irréversible ou physiquement risqué. Certains juges ont parfois exprimé leur prudence par le fait qu’ils craignaient que par le biais de la tutelle à la personne le majeur protégé ne devienne l’otage de son tuteur. C’est dans un contexte où la pratique judiciaire de terrain se montrait peu favorable au développement de la protection de la personne des majeurs que l’arrêté du 27 octobre 1988 sur la formation des gérants de tutelle a inclus un module sur la "tutelle à la personne" dans le programme des études. Depuis, il n’est pas rare que les personnes qui ont suivi cette formation présentent, lors de la soutenance de leur travail personnel, la mission "de prendre soin de la personne" comme la première mission du tuteur.

Le concept jurisprudentiel de protection de la personne du majeur

Ce n’est qu’en 1989 que la Cour de cassation, prenant acte des blocages constatés au niveau des pratiques judiciaires de terrain, a tenu à préciser que d’une manière générale "les régimes de protection des incapables majeurs doivent également pourvoir à la protection de la personne des intéressés". (Cass. Civ. 1re, 18 avril 1989, D. 1989, p. 493). Cet arrêt a été confirmé par d’autres décisions intervenant dans des domaines autres que celui de la tutelle. C’est ainsi qu’un arrêt de la Cour de cassation en date du 10 juin 1991 a précisé que la sauvegarde de justice a elle aussi comme la tutelle une fonction générale de protection de la personne. Cette décision a pu étonner du fait que dans la sauvegarde de justice ordinaire aucun administrateur n’est désigné pour protéger l’incapable majeur et que le majeur concerné par cette mesure est réputé être pleinement capable et conserve tous ses droits civils. L’objectif de cet arrêt était en réalité d’affirmer que le mandat spécial qui accompagne parfois la sauvegarde de justice et qui révèle quant à lui une incapacité de fait, puisse permettre d’assurer la protection de la personne. Il faut encore citer l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 15 mars 1996 qui a considéré qu’un administrateur légal est "investi de plein droit de la mission de prendre soin de la personne". La loi n° 90-527 du 27 juin 1990 s’est référé elle aussi à la conception large de la protection de la personne en formulant dans le code de la santé publique la disposition de l’article L.3 211-9 qui développe qu’il n’y a pas lieu de nommer un "curateur à la personne" lorsque le malade a fait l’objet d’une mesure de protection aux incapables majeurs.
Il n’existe pas véritablement de définition jurisprudentielle du concept de protection de la personne du majeur, ni de liste des actes qu’un représentant légal peut être susceptible d’accomplir en tant que protecteur de la personne d’un majeur. L’étude de la jurisprudence permet de cerner toutefois un certain nombre d’actes qui rentrent dans le cadre de la protection de la personne. C’est ainsi qu’un arrêt de la Cour de cassation en date du 23 février 1993 a indiqué que "les actes relatifs à la protection de la personne du majeur protégé, tel celui de consentir à la reproduction de sa propre image sont soumis à l’autorisation du juge des tutelles".
Il est clair à la lecture des arrêts de la jurisprudence que le concept de "protection de la personne" du majeur ne peut être réduit à la protection de sa santé, il déborde du seul domaine médical dans lequel il existe des textes législatifs pour atteindre l’ensemble de la vie domestique. Deux bons auteurs de la doctrine juridique,Thierry Fos-sier et Michèle Harichaux, écrivent fort justement dans la Revue de droit sanitaire et social de janvier et mars 1991 : "La tutelle à la personne des incapables majeurs est, si nous voulons simplifier à l’excès, l’intervention d’un tiers au soutien des intérêts extrapatrimoniaux d’un adulte protégé". C’est d’une manière erronée que d’autres auteurs, souvent des médecins, ont donc utilisé le terme de "tutelle aux soins" pour définir la "tutelle à la personne". La notion de "tutelle aux soins" est réductrice, même si le tuteur à la personne est souvent présenté par les médecins dans des termes qui expriment à juste raison l’idée que cet administrateur est le "représentant thérapeutique de l’incapable". Il faut souligner le maintien dans ce cas précis du concept "d’incapable" dans le langage médical. Ce concept renvoie aux situations pratiques où le majeur est dans les faits incapable d’exprimer de manière libre et éclairée un consentement et se trouve de ce fait dans le besoin d’une véritable "tutelle aux soins". La recommandation du Conseil de l’Europe du 23 février 1999 place implicitement la "tutelle aux soins" dans le concept bien plus large de la tutelle à la personne évoqué dans l’article 8 sous la formulation de "prééminence des intérêts et du bien-être de la personne concernée". La recommandation du Conseil de l’Europe évoque une protection de la personne dont la globalité paraît être la caractéristique majeure. La communication de la garde des Sceaux présentée en Conseil des ministres le mercredi 30 janvier 2002 se situait dans la même perspective. Le document évoquait en effet la "protection de la personne" sous l’angle de "l’accompagnement humain, social de la personne, et non pas seulement la gestion des biens". D’une manière très significative c’est par l’obligation faite au délégué à la protection du majeur de "visiter régulièrement la personne concernée sur son lieu de résidence pour vérifier ses conditions concrètes d’existence" que la communication de la garde des Sceaux entrait de manière très pratique dans la problématique de la "protection de la personne". Cet aspect pratique de la protection de la personne est sous-jacent dans certaines jurisprudences comme par exemple cet arrêt de la Cour de cassation du 15 mars 1996 qui précise que l’administrateur légal doit veiller à la sécurité de la vie quotidienne du majeur. Il est évident que les rencontres fréquentes entre le délégué à la protection des majeurs et le majeur protégé sur le lieu de résidence de ce dernier sont d’une importance capitale dans la mesure où l’administrateur peut évaluer de manière continue la capacité du majeur à vivre dans son lieu de résidence en toute sécurité. La cour d’appel de Paris dans un arrêt du 15 mars 1996 a indiqué d’une manière nette que le responsable légal doit "veiller à la sécurité de sa vie quotidienne". Ainsi par exemple le représentant légal doit veiller à ce que le conduit de la cheminée de la maison du majeur soit ramoné régulièrement. L’exigence de veille sur la sécurité et la vie quotidienne peut conduire certains tuteurs à devenir des aidants en mesure de prendre l’ensemble des microdécisions qui sont susceptibles de garantir au jour le jour la sécurité de la vie quotidienne des patients. L’exigence de veille sur la sécurité et la vie quotidienne est ainsi commentée par Thierry Fossier dans la perspective de la réforme du droit des incapables majeurs : "Le tuteur ou le curateur devra visiter (la personne) à un rythme minimal, selon ce que devrait à notre avis prévoir le code civil, mais qui sera plus vraisemblablement traité dans le nouveau code de procédure civile" (Defrénois n° 01/05, p. 19).
Bien que cela n’ait pas encore été affirmé dans les arrêts de la jurisprudence, il est évident que le responsable légal a aujourd’hui pour mission d’empêcher l’isolement du majeur protégé. De nombreux majeurs protégés sont sans emploi, et vivent dans des appartements en ville, dans une grande solitude. Cet état de fait conduit les responsables légaux à aller au-delà de leur rôle afin de combler un vide, caractérisé par le manque de travailleurs sociaux, de type éducateur, ou animateur, mais dont le profil est à inventer. La mission des représentants légaux se limiterait alors à aide offerte aux intervenants sociaux en vue d’une bonne adaptation de leur travail aux besoins du majeur.

La mission de veille sur la sécurité et la vie quotidienne des majeurs protégés

La mission d’aide aux autres intervenants et de coordination de leurs interventions donne au responsable légal un rôle central au sein du réseau d’accompagnement du majeur. Les négligences dans l’exercice de la mission de veille sur la sécurité de la vie quotidienne sont susceptibles d’entraîner diverses incriminations pénales telles que la "mise en danger d’autrui" (article 221-6 du code pénal) ou le "délaissement" (article 223-3 du code pénal).
Dans le cadre de leur mission de veille sur la sécurité et la vie quotidienne de leurs protégés, les représentants légaux doivent faire attention à ce que les majeurs protégés ne soient pas victimes :
- de personnes qui les repèrent pour les détrousser de leur argent, leurs vêtements, leur mobilier ;
- de personnes qui s’implantent à leur domicile pour les racketter ou vivre à leur crochet. Il s’agit là de situations qui préoccupent de manière fréquente aussi bien les représentants légaux que les psychiatres.
G. Amphoux précise au nom de ces derniers : "Nous avons la connaissance personnelle de nombreux malades, schizophrènes pour la plupart, dont l’appartement est squatté par d’autres malades mentaux ou des marginaux vivant plus ou moins à leur charge. Ils peuvent même chasser le malade de son domicile" (Criminologie et psychiatrie légale, Ellipses, 1997, p.42) ;
- de dragueurs ou de pervers sexuels qui les considèrent en raison de leur passivité ou de leur manque de discernement comme des partenaires faciles, ou des proies potentielles. Les majeurs protégés sont enfin souvent victimes ;
- de la délinquance juvénile gratuite, qui de manière si fréquente aujourd’hui s’attaque aux individus les plus faibles.
Les représentants légaux sont parfois amenés à agir, non seulement pour prévenir les actes de délinquance dont leurs protégés pourraient être victimes, mais encore à solliciter la force publique pour faire expulser des squatters, à porter plainte, et à se constituer partie civile, s’agissant de majeurs en tutelle, ou à soutenir, s’agissant de majeurs sous curatelle, les intéressés, dans leurs plaintes ou leur constitution de partie civile. C’est le cas, notamment à l’occasion d’affaires de coups et blessures, et de viols. Il faut observer qu’il n’existe aucune statistique précisant la fréquence des dépôts de plaintes, ainsi que des constitutions de partie civile, concernant les affaires où des incapables majeurs sont en situation de victime. Une connaissance statistique de la réalité ne renseignerait cependant que d’une manière imparfaite sur les actes de violence dont sont victimes les majeurs protégés. Ces actes ne sont pas toujours suivis de plaintes ou de constitutions de partie civiles car les représentants légaux ne sont pas toujours informés par leurs protégés, ou par les responsables institutionnels, des actes de violence. D’autre part, lorsqu’il y a intervention judiciaire il faut observer que les non-lieux sont fréquents pour des raisons liées à l’état mental des victimes. Il est courant que les incapables majeurs soient tellement confus qu’il leur est en fait impossible de dire ce qui s’est réellement passé, ou de donner le signalement de l’agresseur.
L’accompagnement humain et social de la personne est également important lorsque les majeurs protégés résident dans une institution. Les rencontres fréquentes entre le gérant de tutelle et le majeur protégé permettent :
- de recueillir les souhaits et les doléances du majeur et de se conformer pleinement au principe de "respect des souhaits et des sentiments de la personne" qui constitue le principe 10 de la recommandation n°R.99.4 adoptée par le Conseil des ministres du Conseil de l’Europe le 23 février 1999 ;
- de détecter les problèmes éventuels et de pouvoir en discuter avec les personnels soignants et sociaux de l’établissement, avec les partenaires extérieurs, avec la famille ;
- de veiller à la qualité des soins et de l’hébergement en s’assurant notamment que le majeur ne fait pas l’objet de mauvais traitements. Le représentant légal doit avoir conscience que les majeurs protégés sont des personnes vulnérables et que les lieux et les milieux soignants, ne sont pas absolument protecteurs. La même remarque peut être faite à propos des établissements pénitentiaires qui hébergent aujourd’hui un certain nombre de malades mentaux placés sous un régime de protection.
Thierry Fossier considère, dans la perspective de la réforme du droit des majeurs protégés, que "la question centrale de la tutelle ou de la curatelle par un préposé d’établissement de soins, est celle de la protection de la personne... Lorsqu’un majeur est retenu dans un lieu clos parce qu’il est malade ou très âgé, il n’est pas nécessairement bon que l’un des agents de cet établissement excède la pure gestion patrimoniale. Il serait donc éminemment souhaitable que le juge des tutelles décide si la mission de protection par tel préposé doit être limitée aux biens. Une telle disposition est utile lorsque l’établissement en raison de son isolement, de sa petite taille ou d’un fonctionnement un peu étouffant n’offre pas de garantie d’objectivité suffisante dans la prise en compte des soucis personnels du malade ou du handicapé" (Defrénois 01/05, p. 29).
L’accompagnement humain et social concerne aussi les majeurs protégés qui sont maintenus dans le cadre familial. Les représentants légaux doivent s’assurer que ces derniers ne sont pas victimes de leur entourage.
Les lois de 2002 ont évoqué à plusieurs reprises le rôle du "représentant légal" à propos des majeurs protégés. Ainsi la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale évoque le "représentant légal", dans des formulations intégrées dans les articles L.311-3 et L.311-4 du code de l’action sociale et des familles. L’article L.313-3 précise en son alinéa 3 qu’"une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement (celui de l’usager), son autonomie et son insertion, adapté à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé qui doit être systématiquement recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. À défaut le consentement de son représentant légal doit être recherché". L’alinéa 7 ajoute que "la participation directe ou avec l’aide de son représentant légal à la conception et à la mise en œuvre du projet d’accueil et d’accompagnement qui le concerne". La loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale vise plus particulièrement la mission de veille sur la sécurité et la vie quotidienne des majeurs protégés lorsqu’elle énonce que "le représentant légal veille sur la qualité des soins et d’hébergement. Il est un partenaire qui aide la personne à être entendue, soutenue".
La participation du représentant légal à la veille sur la qualité de soins et de l’hébergement est une mission dont l’exercice est particulièrement délicat pour les gérants de tutelle hospitaliers car ces derniers sont des salariés de l’établissement de soins ou d’hébergement. La mission de veille peut en effet amener les gérants de tutelle hospitaliers à constater des dysfonctionnements de l’établissement, susceptibles d’être dénoncés aux autorités compétentes, et se trouver alors de ce fait dans une situation dite de "conflit d’intérêt". Dans ce type de situation la démarche minimum consiste à informer le juge des tutelles des faits constatés et à lui demander des instructions. Si le conflit d’intérêt est réel, l’information qui est faite au juge peut être accompagnée d’une demande de décharge de la part du gérant de tutelle.

Les décisions qui affectent la personne du majeur protégé

L’arrêt de la Cour de cassation du 24février 1993 semble exiger, conformément au deuxième alinéa de l’article 500 du code civil une autorisation du juge des tutelles dans tous les actes des gérants de tutelle relevant de la protection de la personne. Il faut cependant mentionner un arrêt ambigu de la cour d’appel de Paris, en date du 15 mars 1996, qui rappelle tout d’abord le principe posé par l’arrêt du 24février 1993 : "... S’il incombe à l’administrateur légal... de prendre soin de la personne de son protégé, il est constant qu’il n’intervient à cet égard que sous la direction du juge des tutelles" mais qui semble en relativiser l’exigence pour les actes tout à fait mineurs qui rentrent dans l’accompagnement courant du majeur. L’arrêt poursuit en effet en indiquant qu’il revient au juge des tutelles, "sous la direction" de laquelle intervient le représentant légal, de prendre "les décisions importantes affectant la personne du majeur qui sont de la compétence du Conseil de famille dans la tutelle complète". L’arrêt sous-entend a contrario qu’il existe un seuil de compétence autonome du tuteur pour des décisions courantes qui ne revêtent pas le caractère d’acte important. Dans le cas de l’espèce, la décision d’accompagnement contestée était très courante ; il s’agissait d’une demande présentée en vue de la sortie d’une majeure d’un établissement hospitalier. La demande posait toutefois un problème particulier qui faisait rentrer la décision à prendre dans la catégorie des actes importants. La sortie était en effet sollicitée à l’encontre de l’avis du médecin traitant. La compétence autonome de l’administrateur légal n’a pas été reconnue par la cour d’appel de Paris, eu égard à l’importance de la décision à prendre, alors que l’acte contesté était par ailleurs acte familial puisqu’il était sollicité par un administrateur légal, qui n’était autre que le fils de l’incapable majeure. Malgré cette circonstance familiale particulière le fils qui agissait en tant qu’administrateur légal aurait dû selon l’arrêt précité solliciter l’autorisation du juge des tutelles : "Considérant qu’il s’ensuit que le jugement entrepris mérite confirmation en ce qu’il a décidé qu’à la date du f juin 1992, faute d’être autorisé par le juge des tutelles, M. D.S. n’avait pas qualité pour requérir la sortie de sa mère de l’hôpital Charles-Foix".
La cour d’appel de Paris a considéré dans le cas de l’espèce qu’un administrateur légal, fût-il le fils de la majeure, ne pouvait accomplir seul l’acte consistant à demander la sortie de sa protégée de l’établissement hospitalier dès lors que le retour à domicile de "Mme D.S., atteinte de la maladie d’Alzheimer et totalement dépendante" pouvait "être particulièrement lourd de conséquence pour la santé, voire pour la sécurité élémentaire de l’intéressé" et qu’il lui appartenait, en vertu de l’article 500, alinéa 2 du code civil, de saisir le juge des tutelles qui pouvait le cas échéant lui donner l’autorisation d’accomplir cet acte ou constituer une tutelle complète.
La "direction" de la protection de la personne, que l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 15 mars 1996 reconnaît au juge des tutelles, est un concept rassurant et confortable pour les gérants de tutelle dans la mesure où il leur évite de porter dans la solitude les questionnements éthiques et où il permet d’éviter des dérapages toujours possibles. Une sphère de compétence plus large des administrateurs légaux et des gérants de tutelle dans le domaine spécifique des prises en charge sociales mériterait cependant d’être reconnue par la jurisprudence, d’autant que le législateur ignore la plupart du temps dans ce domaine le concept de "direction du juge" au profit d’un partenariat entre le tuteur et les institutions sociales. Ainsi dans la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale il a introduit dans le code de l’action sociale et des familles un article L.311-4 qui stipule, s’agissant des institutions médicale et médico-sociale : "Un contrat de séjour est conclu ou un document individuel de prise en charge est élaboré avec la participation de la personne accueillie ou de son représentant légal".
En ce qui concerne les tuteurs qui exercent dans le cadre de tutelles complètes, il est admis par la jurisprudence qu’ils peuvent consentir seuls à des actes secondaires et qu’ils doivent solliciter l’accord du Conseil de famille ou du juge des tutelles pour les actes importants. La garde des Sceaux a envisagé dans sa communication en Conseil des ministres le 30 janvier 2002 la reconnaissance expresse par la loi de cette pratique notamment lorsqu’il s’agit d’atteintes graves à la vie privée et au corps humain. La ministre indiquait : "Sera posé le principe de la saisine du Conseil de famille ou, à défaut du juge pour autoriser les décisions mettant gravement en cause le respect de la vie privée et du corps humain".
Il existe un sentiment de malaise de l’ensemble des tuteurs par rapport à la jurisprudence existante, il provient de ce que la limite entre actes secondaires et actes "importants" (encore qualifiés d’actes "graves") n’est pas toujours évidente. Les auteurs de la doctrine reconnaissent volontiers cette difficulté. Ainsi Thierry Fossier et Michèle Harichaux écrivaient-ils dans la Revue de droit sanitaire et social de janvier-mars 1991 : "Il serait hasardeux de distinguer entre l’acte bénin et l’acte grave, car l’acte apparemment bénin peut être lourd de conséquences".
Le malaise se trouve aggravé, lorsqu’il s’agit de tutelles administratives par le fait que si les représentants légaux ne peuvent pas échapper à leur mission de protection de la personne, ils ne jouent pas pour autant un rôle de substitution à la famille. Ne se trouvant pas de ce fait dans une exclusivité d’une fonction qui peut être exercée parallèlement par les proches, il s’agit pour les tuteurs administratifs de trouver un positionnement juste et tenable par rapport aux familles. La situation est devenue encore plus complexe dans les cas où, la protection de la personne est au cœur d’une problématique médicale, et que la matière rentre dans le champ de compétence de la "personne de confiance" instaurée par la loi du 4 mars 2002.
La Cour de cassation estime que le passage de la protection du patrimoine à la protection de la personne est un devoir et que le tuteur doit l’assumer soit en y répondant directement si l’acte est secondaire, soit en sollicitant l’autorisation du Conseil de famille ou du juge des tutelles si l’acte est important. Ce devoir d’assumer s’impose à partir d’un certain seuil à la personne ou à l’administrateur qui assure une protection tutélaire complète. La notion de seuil est indirectement formulée dans plusieurs arrêts de la Cour de cassation. C’est ainsi que la Haute Juridiction a déclaré conforme à la loi un jugement du tribunal de Corbeil qui avait exprimé la notion de seuil en affirmant que : "C’est seulement lorsque le majeur est dépourvu de volonté propre que la protection tutélaire peut aboutir à un véritable gouvernement de la personne". La cour d’appel de Paris a affirmé également dans une formulation intéressante cette notion de seuil dans un arrêt qui développe que "c’est seulement quand le majeur est incapable d’énoncer une volonté sur un point déterminé que l’on peut confier au tuteur des pouvoirs concernant sa représentation dans des actes personnels".
Si le fondement en droit positif de la jurisprudence de la Cour de cassation et des cours d’appel n’est pas contesté, une difficulté perdure dans la mesure où le concept jurisprudentiel de la protection de la personne se réfère aujourd’hui de moins en moins à l’article 500 du code civil et de plus en plus à l’article 450. L’article 450 stipule : " Le tuteur prendra soin de la personne du mineur ". Cette évolution jurisprudentielle a été inspirée par certains auteurs de la doctrine comme M. Massip qui ont toujours fait abstraction de l’article 500 du code civil. Leur idée est simple : en l’absence de volonté propre le majeur doit être assimilé à un mineur (La réforme du droit des incapables majeurs, 3e éd. 1983, n° 221). Certains parmi ces auteurs sont allés jusqu’à comparer la "protection de la personne du majeur" à l’autorité parentale, alors qu’une lecture attentive de la jurisprudence démontre qu’il s’agit de là de concepts très différents, aussi bien dans leurs objectifs que dans leurs pratiques. L’autorité parentale investit le représentant légal du mineur du pouvoir de contrôler les allers et venues de ce dernier. La loi de 1968 instituant les régimes de protection des majeurs n’a pas eu pour but de conférer au représentant légal une telle autorité. Comme l’écrivent excellemment dans un ouvrage M. Bauer et Th. Fossier, le but du législateur était essentiellement de "transposer à la protection des majeurs les règles de gestion patrimoniales, inaugurées avec succès en 1964 pour les mineurs" (Les tutelles, protection juridique et sociale des enfants et des adultes, 3e éd. 1999, ESF, p. 301).
L’article 450 du code civil précise que le responsable légal doit "prendre soins de la personne du mineur". L’article 450 du code civil s’analyse comme un dispositif de fond sur l’orientation de l’action tutélaire en matière de tutelle des mineurs. S’il est logique, eu égard à l’objectif du législateur de 1968, de tenir compte de l’article 495 du code civil qui stipule : "Sont aussi applicables dans la tutelle des majeurs les règles prescrites pour la tutelle des mineurs, à l’exception toutefois de celles qui concernent l’éducation de l’enfant", il faut observer que les problématiques en matière de protection des mineurs sont pour la plupart très différentes des problématiques de la protection des majeurs. La différence des problématiques au niveau de la protection de la personne des majeurs n’a pas été perçue par le législateur de 1968 en raison du fait qu’il n’a porté aucune attention à la question générale de la protection de la personne du majeur. Cette absence d’attention transparaît à travers l’absence de débat parlementaire sur cette question. Les articles 495 et 450 du code civil furent adoptés quasiment sans discussion. Les changements dans le profil des majeurs protégés, comme celui de la pratique des mesures de protection, qui sont constatés depuis quelques années accentuent la différence.
Les majeurs protégés qui étaient déjà bien peu assimilables à des mineurs en 1968, le sont encore moins aujourd’hui. Le décret n° 74-930 du 6 novembre 1974 avait tenu compte en son temps de la différence des problématiques existantes puisqu’il évoquait la nécessité de faire appel le cas échéant à des administrateurs spécialisés suivant qu’il s’agissait de tutelle de mineurs ou de tutelle de majeurs. L’article 8 du décret développait ainsi que : "Le procureur de la République établit pour chaque ressort du juge des tutelles... une liste des personnes physiques ou morales qualifiées qui acceptent d’être déléguées à la tutelle d’État. Cette liste est établie distinctement pour la tutelle des mineurs et pour celle des incapables majeurs ".
La différence dans la manière d’exercer la fonction tutélaire était déjà perceptible en 1974, d’où le principe réglementaire de l’établissement d’une liste distincte pour les personnes qualifiées en matière de tutelle des mineurs et de tutelle des majeurs. La référence au concept de "père de famille" qui est contenue dans l’article 450 du code civil paraissait déjà beaucoup moins pertinente pour la protection de la personne du majeur qu’elle ne l’était pour la protection de la personne du mineur. Th. Fossier est tout à fait dans l’esprit de ce texte lorsqu’il plaide pour une tutelle qui soit aussi une tutelle à la personne sans pour autant qu’elle puisse être assimilée à l’autorité parentale sur les mineurs, et dans laquelle les juges des tutelles doivent jouer un rôle actif.

Les problématiques de l’autonomie de la volonté du majeur protégé et de son consentement éclairé

La garde des Sceaux, lors de sa communication devant le Conseil des ministres le 4janvier 2002, a insisté sur le fait que la protection de la personne des majeurs protégés devra être reconnaissante, chaque fois que possible, de l’autonomie de la volonté du majeur protégé. L’autonomie de la volonté du majeur protégé est reconnue à juste raison par les arrêts jurisprudence. Il est manifeste en effet que le législateur n’a pas entendu faire de la tutelle une mesure de gouvernement de la personne, et qu’il appartient dans ces conditions de rechercher en toutes circonstances la volonté du majeur. La référence jurisprudentielle en la matière est un arrêt de la Cour de cassation du 20 mars 1997. Ce principe, qui est celui de "l’autonomie de la volonté du majeur protégé" est formulé d’une manière expresse dans certains droits positifs étrangers. Il faut citer par exemple la loi allemande d’avril 1990.
La recommandation du Conseil de l’Europe du 23 février 1999 évoque le principe de l’autonomie de volonté du majeur protégé en deux occasions. La première lorsqu’elle invite, dans son principe 9, au respect des "souhaits" et des "sentiments" de la personne concernée, la seconde lorsqu’elle développe dans son principe 19 qu’il existe des "actes juridiques de nature si personnelle qu’ils ne peuvent être accomplis par un représentant". La recommandation n’énumère pas ces actes et laisse aux droits internes le soin de les définir.
Le droit du majeur ou de la majeure à procréer, ainsi que celui de la majeure à interrompre volontairement une grossesse, semblent rentrer dans la catégorie des "actes juridiques de nature si personnelle qu’ils ne peuvent être accomplis par un représentant". La garde des Sceaux se situait parfaitement dans l’esprit de la recommandation du Conseil de l’Europe lorsqu’elle précisait devant le Conseil des ministres : "Acteur du processus de mise en œuvre de sa protection, le majeur participera aux décisions personnelles qui le concernent, à moins que son état de santé ne l’interdise". L’objectif est ici très proche de l’esprit du code de déontologie médicale. Ce code précise en son article 42 que "si l’incapable majeur peut émettre un avis, le médecin doit en tenir compte dans toute la mesure du possible". Il faut observer que la proposition de réforme n’énonce point "quels sont les actes juridiques de nature si personnelle qu’ils ne peuvent pas être accomplis par un représentant" et que c’est la jurisprudence qui devrait se charger de les définir. L’accomplissement du droit de la majeure à procréer ou à interrompre volontairement une grossesse rentre de toute évidence dans cette catégorie d’actes. Il existe en ces deux domaines quelques jurisprudences qui posent avec fermeté le principe de l’autonomie de la volonté.
La recommandation R. 99. 4 sur les principes concernant la protection juridique des majeurs prise par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe le 23 février 1999 fait également référence à l’autonomie de la volonté du majeur protégé lorsqu’il pose le principe du consentement de ce dernier à toute intervention dans le domaine de la santé. Le principe 22 stipule en effet : "Lorsqu’un majeur, même s’il fait l’objet d’une mesure de protection, est en fait capable de donner son consentement libre et éclairé à une intervention déterminée dans le domaine de la santé, celle-ci ne peut être pratiquée qu’avec son consentement. Le consentement doit être sollicité par la personne habilitée à intervenir".
Le "consentement libre et éclairé" du majeur, "même s’il fait l’objet d’une mesure de protection", se fonde nécessairement sur une information donnée à l’intéressé. La loi du 4 mars 2002, dite loi Kouchner, a intégré dans le code de la santé publique un dispositif précisant au cinquième alinéa de l’article L.1 111-2 que " les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée... à leurs facultés de discernement s’agissant des majeurs sous tutelle". La loi du 4 mars 2002 ajoute au cinquième alinéa de l’article 1111-4 que "le consentement du... majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision". Depuis cette loi, certains organismes tutélaires ont pris l’habitude de demander aux médecins s’ils ont fait le nécessaire pour rechercher le consentement de la personne.
La notion de "consentement éclairé" déborde du domaine des actes médicaux et s’étend, depuis la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, aussi aux actes qui relèvent de la prise en charge sociale ainsi l’article L.311-3 du code de l’action sociale et des familles, issu de l’article 7 de la loi, précise que doivent être assurés à l’usager du secteur social et médico-social "une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement, son autonomie et son insertion, adapté à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé qui doit être systématiquement recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. À défaut, le consentement de son représentant légal doit être recherché".
La garde des Sceaux, dans sa communication présentée au Conseil des ministres du mercredi 30 janvier 2002, n’a pas défini un concept autonome de la "tutelle à la personne" par rapport à la "tutelle aux biens". Elle a formulé un concept global de la protection tutélaire conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation. Le concept différencie cependant "la tutelle aux biens" qui demeure un régime de représentation et la "tutelle à la personne" qui est un régime participatif très proche dans son esprit de la curatelle. Certains auteurs, tels Thierry Fossier et Michèle Harichaux estiment que le niveau de participation du majeur peut être dans certaines situations tel que l’intéressé peut même échapper à la protection de la personne (Rev. Droit Sanit. et Soc. 27, janv.-mars1991).
Le rapport Favart est curieusement très peu évoqué lorsque l’on parle de protection de la personne des majeurs protégés. La raison en est simple, ce rapport établi par un groupe de travail, dont le président était conseiller honoraire à la Cour de cassation est demeuré dans la ligne d’une vision classique en raison de son alignement sur la jurisprudence existante en ce domaine. Le rapport a passé sous silence le fait qu’il existe des solutions alternatives au concept global formulé par la Cour de cassation. Le rapport oublie de préciser par exemple qu’en matière de tutelle des mineurs l’article 417 du code civil laisse le choix au Conseil de famille entre un concept global de la tutelle et deux concepts autonomes et édicte ainsi que "le Conseil de famille peut, en considérant les aptitudes des intéressés et la consistance du patrimoine à administrer, décider que la tutelle sera divisée entre un tuteur à la personne et un tuteur aux biens..." Il faut rappeler que cette logique est celle de l’article 2 du décret n° 74-930 du 6 novembre 1974 qui stipule qu’"il peut être procédé à des désignations de personnes différentes pour exercer au nom de l’État, la tutelle à la personne et la tutelle aux biens". Le rapport Favart n’a que des inspirations hexagonales. Il ne fait aucune référence aux législations étrangères qui sont fondées sur le principe de la désignation de deux tuteurs, l’un pour la tutelle à la personne, l’autre pour la tutelle aux biens. Le système suisse qui fonctionne sur ce schéma aurait pour le moins mérité d’être signalé par le rapport Favart.

Documents joints

  • Tutelle (PDF - 1.3 Mo)
    La protection de la personne des majeurs- par J.-L. DESCHAMPS - paru dans Synapse - n° 222 - février 2006

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